Pensée n°413
La tolérance à l’américaine
Il y a une sorte de tolérance venue des Etats-Unis, qui s’explique. Depuis leur plus jeune âge, les Américains croisent, à l’école d’abord et dans leur quartier, des garçons s’appelant Meritt, Thornton, Zane ou Moss, c’est-à-dire des prénoms dont beaucoup sont inconnus de leurs milieux, et on leur apprend à ne pas en rire, à les accepter. Puis, ce sont des usages, des coutumes, multiples dans ce creuset du cosmopolitisme, qu’on est invité à tolérer. Pour un Américain, il est donc normal de croiser beaucoup de choses différentes et étrangères.
Mais si l’on croise beaucoup, on ne creuse guère. Dans les sociétés plus traditionnelles, on a des repères à la fois moins nombreux et plus profonds. Les nouveautés entrent en moins grand nombre, mais elles sont davantage analysées, pensées, évaluées. Au Japon, le peu d’information qui filtrait d’Occident était exploité au maximum, d’où cette habitude d’une grande humilité, une acuité, un plaisir de recevoir, une habitude de se taire, de se sentir honoré et de travailler pour faire aussi bien. Les Américains au contraire reçoivent tout sans y prêter attention, à moins que ça ait du succès. Le succès est leur baromètre, pas la valeur intrinsèque. On a là deux modèles : l’un qui cherche un sens, l’autre qui reste en surface, qui surfe. C’est pour cela que la culture américaine ne parvient pas à éblouir par sa profondeur, dans son ensemble, alors que le Japon ou l’Europe nous entraînent plus loin. L’âme humaine peut certes être primesautière, mais ses grandes réalisations sont dans l’approfondissement. C’est aussi là qu’il y a une incompréhension totale entre Russie et Amérique. La Russie est un monde intériorisé.
(Pensées Accouchées de la Prison d’Occident, Rémy D.-WIEDEMANN, éd. Le Moine-guerrier, 2023, copyright 2023, tous droits réservés)
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