Dans « », Rémy D. WIEDEMANN écrit à la pensée n°140:
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Objectiver. Prostituée mieux que journaliste !
Le monde politique fait des tas de choses sans jamais objectiver. Les lois sont votées en consultant des commissions où débattent des gens qui font valoir des opinions subjectives, ainsi que des “experts” qui ne sont surtout que des experts en subjectivité, partiaux, livrant de plus en plus des résultats qui correspondent à ce que leurs maîtres leur dictent.
C’est vrai aussi de la Justice, nous l’avons dit : deux juges peuvent infliger des peines complètement différentes pour le même cas ! Pareil pour les journalistes : deux d’entre eux traiteront le même sujet en concluant différemment. Aberration !
Pourquoi ? Parce que tout se fait essentiellement au pif, en réalité.
Ce sont toutes les structures dirigeantes de l’Occident qui nagent en pleine subjectivité. On en est encore à ce point qu’on dirige des continents au pif ! C’est fascinant. Il n’y a aucune objectivation en politique.
Or, l’objectivation est l’une des clés pour notre société future. Nous exercerons un pouvoir objectivé, à défaut d’être parfaitement objectif (ce qui n’existe pas). L’objectivation va détruire 99 % des problèmes actuels, et c’est déjà excellent.
Il n’y aura plus de politicaillerie puisque toutes les décisions seront objectivées, tous les programmes politiques, tous les bilans, tous les rôles, tous les budgets. Il n’y aura plus d’État profond puisque les officines ne passeront pas le cap de la simple tolérance. Il n’y aura plus de milliards injectés derrière un Macron. Il n’y aura plus de Pfizer sur le territoire français, ni de radars sur les routes, ni d’école laïque et obligatoire, tout simplement parce que si l’on objective, on s’aperçoit que tout cela ne marche pas. Les médecins en conflit d’intérêt ne pourront plus venir vanter la vaccination de masse puisque l’objectivation aura rendu impossible le conflit d’intérêt et donc leur droit à exercer leur fonction. Ce ne sont plus des politiques qui décideront que le Conseil de l’Ordre est respectable, mais une base de données objectives. Laquelle dira, vous verrez : “association de malfaiteurs, dissolution et poursuites nécessaires”. C’est tout. L’existence de groupes néfastes pour l’État et le peuple ne sera même plus possible.
Non pas que nous aurions une base de données fixes qui serait en quelque sorte un système de lois. Ce sera un système vivant alimenté au fur et à mesure par les résultats de toute la vie de la cité (et cela, on le fait déjà en partie dans nos sociétés modernes) et d’un autre côté par des critères et des taux. Je vous donne des exemples ci-dessous.
Il suffira de se mettre d’accord sur des critères, par exemple dans la base concernant la mise sur le marché de vaccins : “efficacité prouvée par 100 études en double aveugle sur une période minimale de 10 ans ?”. Réponse : oui, non. Et ce sera fini dès ce stade pour tous les vaccins anti-covid actuels. Ils seront réfutés d’entrée de jeu. C’est tout, n’allez pas vous casser la tête.
Supposons qu’un producteur pédocrate veuille diffuser un film dégoûtant en France, on entre dans la base de données ses notes en face des critères comme “Nombre d’incitations manifestes ou suggérées à la pédocriminalité” : 14. Cette note, rapportée au taux, amène le résultat : “Diffusion interdite sur le territoire”.
Supposez un politicard qui se présente à une élection. On entre dans la base ses notes en face de “conformité de ses actes avec ses promesses électorales, année x, année y, année z”, ou “propose un budget national endettant la France” oui, non, et hop, sa candidature est expédiée (acceptée ou récusée).
Vous comprenez le principe ?
Il n’y a plus de place pour les coups de jarnac. A ce stade, il n’y a même pas besoin d’ “intelligence artificielle”.
Cette objectivation, vous pouvez la rendre extraordinairement aboutie, et même complexe. Vous pouvez faire entrer dans une base de données tout le Code pénal, et avoir des jugements de Justice d’une précision quasi-parfaite. Il n’y aura plus de criminel relâchés dans la nature et de truands en liberté, il n’y aura plus de prison pour des innocents. Non pas qu’il faille exclure l’humain du processus, sinon ce serait BigBrother, mais la machine dominée par l’Homme peut du moins rassembler les critères et fournir une fourchette. En Justice, par exemple, pour tel crime odieux, la base ressortirait instantanément : “peine minimale 17 ans, maximale 22 ans”. Au juge ensuite de décider, selon sa conscience. Tandis que jusqu’à présent, les procès les plus basiques peuvent n’avoir lieu qu’au bout de 5 ans (sic !) . Il est évident que les magistrats vont vous dire qu’aucun procès n’est basique, que tout est compliqué et demande des moyens. C’est le langage usuel des gens qui cherchent à capter de l’argent et du pouvoir. En réalité, dans plus de 90 % des cas, toute l’instruction pourrait être faite en quinze jours, et ce qu’on découvrira ultérieurement est à la marge. Admettons que dans certains cas, pour obtenir un témoignage d’un ultra-marin ou d’un étranger, il faille davantage, ça n’est pas le problème, car les durées excessives ne sont pas dues aux lenteurs de l’instruction, mais à la lenteur des personnels judiciaires. Dans mon affaire, je savais au bout de deux après-midi, sans me presser, ce qui allait arriver : le non-lieu1. Au bout de 10 mois, j’attends toujours. C’est un scandale ! Et un grief grave qui est fait au justiciable.
L’objectivation, ce sera :
Gain de temps + gain d’énergie + gain d’argent + efficacité + transparence + réduction du nombre des fonctionnaires + moralité.
Les syndicats ne pourront plus fonctionner comme ils fonctionnent, les ministères, la police, les hôpitaux, les écoles, la fiscalité non plus. Tout, tout peut être objectivé dans le domaine public. Les administrations devront changer ou seront abolies. Chaque impôt sera remis en cause : est-il profitable réellement pour l’ensemble de la société ? (vous verrez que la très grosse majorité d’entre eux ne le sont pas : ils tuent l’activité économique, et donc l’impôt lui-même).
On laissera la subjectivité là où elle s’ébat le mieux : en amour, dans les arts, en humour… mais plus dans la chose publique. La vie politicienne, avec ses partis et ses chapelles, doit être mise à mort. Eh ! Oui.
Partout où les Etats sont forts dans le monde, l’objectivité a sa place. Qu’est-ce qui fait la force des Etats (relativement) propres de Scandinavie ou de Singapour ? Plus d’objectivation que nous.
Vous verrez que lorsque les choses seront objectivées, vous aurez des partis presque parfaits, tous exemplaires. Puisque les approximations, les tambouilles, les arnaques et les bobards seront devenus impossibles.
Bref, c’en sera fini de toute cette soupe irrationnelle, politicienne voir clandestine. Il n’y aura plus de financement de la guerre en Ukraine, puisque le financement d’une guerre étrangère devra répondre à des critères objectifs. La vérité imposera, via un chiffrage froid et exact, la décision à prendre. Tout passera au crible d’une comptabilisation précise, selon des critères précis. Impossible d’être corrompu, impossible de travailler pour une puissance étrangère ou une loge clandestine. Tous les critères peuvent être réunis dans une base de données, avec des taux relatifs, selon l’importance. Les salaires des politiciens et des fonctionnaires seront corrélés à des résultats, et même les sanctions pénales. Les politiciens fautifs feront de la prison, s’ils fautent gravement, au lieu de se représenter impudemment à des élections.
Dans L’Inévitable Résurrection des Peuples, j’écris :
S’il y a une chose qui existe dans de nombreux métiers et qui n’existe pas en politique, c’est l’objectivation des choses. Je vous explique.
Pendant des années, j’ai objectivé des données subjectives. Vous aimez un film mais vous ne savez pas pourquoi. Vous aimez un pays mais vous ne savez pas pourquoi. Ou une ville, ou un festival, ou un morceau de musique. Dans votre boutique, vous ne savez pas quel produit mettre en avant.
Plein de choses sont faites au doigt mouillé, à la louche, au pif. Et des tas de critères bouchent l’horizon. Quand vous faites une équipe, vous faites entrer des tas de critères subjectifs, inconsciemment, vous rassemblez des compétences mais vous prenez rarement autre chose que les compétences individuelles, il arrive même que vous négligiez un talent qui change tout.
Or, on peut presque tout objectiver. Il faut y passer un peu de temps mais le calcul fait le reste. Si vous avez une calculette, ou un tableur, vous gagnez des siècles.
Vous pensez que le gouvernement est nul. Ou que votre programme de formation est bon. En réalité, vous êtes incapable de dire pourquoi, de donner une note précise. J’aime faire cela, ce n’est qu’une question de critères et de taux.
Je peux dire quelle note vous donnez à un film, à la virgule près, et vous êtes très surpris. Vous auriez donné 18/20 mais en fait, vous pensez 13, sans le savoir. Considérez les dialogues : quelle note, sur 20 ? Puis, l’histoire : quelle note ? Puis, le jeu des acteur. Puis, la musique. Puis le montage. Puis, le suspens. Puis la qualité de la photo. La psychologie. La vraisemblance. La beauté. Les valeurs véhiculées. L’originalité. Indiquez ainsi tous les critères qui vous paraissent importants. Attribuez ensuite un coefficient. Vous attribuerez sans doute un coefficient 4/4 au scénario, parce que si l’histoire est nulle, malgré tout le reste, le film sera inintéressant, du moins sa note sera plus faible. Les dialogues, quelle importance selon vous ? 2/4, 3/4, 4/4 ? Vous indiquez donc chaque coefficient à côté de chaque note. A la fin, faites la moyenne. Et là, vous saurez. Vous aurez beau analyser chaque point, vous donnez 13, et pas 18. Pourtant, vous et tous les autres donneraient 18, à vue de nez. C’est parce que le cerveau a tendance à surestimer ou sous-estimer. Objectiver affine. Plus vous êtes habitué, plus votre cerveau s’affine lui-même. Avant de déménager, d’acheter une maison, une voiture, lancer une campagne, un travail, objectiver est une excellente idée.
Objectiver un être humain, évidemment, ça fait peur, c’est ce qu’on veut éviter. Mais si votre fiston a des doutes, il sera peut-être content de savoir qu’il a une bonne note personnelle : il a des qualités, alors qu’il pense être nul. Cela peut aussi évoluer. Je reconnais que je ne l’ai jamais fait pour mes enfants. Mais dans une entreprise, ça pourrait être intéressant, pour certains postes. La précision pour le comptable, l’imagination pour le commercial etc.
L’objectivation pour la route, l’intuition pour la destination, le talent pour l’improvisation. Voilà ce qui gagnera tout, voilà l’avenir.
Si vous voulez savoir ce que vous devez faire, entrez vos critères, le taux pour chacun, et indiquez les valeurs. Toutes les grosses boîtes font ça pour leurs produits et leur marketing.
On n’a pas fait ça encore pour la politique. Quand on objectivera la politique, aucun des pékins que vous voyez n’existera plus à ces places. On indiquera des critères : honnêteté, respect de la parole donnée, bilan, etc. A ce moment-là, vous verrez des barons de la politique tomber très bas, plus bas que votre boulanger qui, lui, fait grosso modo son boulot. Ce serait intéressant.
Un film passe, Le Stratège2, qui raconte exactement ça, avec Brad Pitt. Dans les années 90, un entraîneur s’est lancé dans l’objectivation, il a entré des tas de données sur des joueurs et des points à faire pour gagner progressivement. Il n’avait pas de budget pour acheter des joueurs talentueux et chers. Il a donc, à l’instigation d’un petit génie d’une université américaine, créé un logiciel qui sortait des noms de joueurs ayant des moyennes constantes et assez hautes, mais aucun n’étant une grande star, ni très bien payé. Il les a embauchés. Ainsi, il a finalement gagné des tournois face à des équipes disposant de beaucoup plus gros budgets avec des champions irréguliers. Evidemment, personne n’y croyait. Il a gagné, avec ses joueurs, contre tous les pros du métier.
On pourrait gagner, en politique, avec un tel outil, même avec des outsiders. C’est tellement vrai que l’Histoire de France l’illustre brillamment. Colbert n’était pas un challenger, il n’était pas brillant, il était souvent malade, travaillait peu, il fut pourtant l’un des meilleurs ministres de tous les temps : il avait une excellente moyenne. Les rois de France n’étaient pas tous brillants ni de grands saints, mais ils s’appuyaient sur une machine ayant une excellente moyenne, d’où une ascension régulière et pour finir la société la plus brillante du monde.
Maintenant, objectivons divers métiers. Comment faire ? Je retiens les critères suivants, pour l’exercice : Niveau moral, Fiabilité du service rendu (fiabilité de l’information pour le journaliste, qualité du produit pour le paysan…), Utilité du métier par rapport au besoin, Capacité à affermir le pacte social, Pénibilité, Niveau culturel et intellectuel. Bien sûr, il faut conserver les mêmes coefficients pour tous les sujets étudiés. Ça donne ceci :

Journaliste de la grosse presse moins bien noté, objectivement, que prostituée. Confirmation, donc ! Où l’on voit que l’objectivation, ça paye. Essayez avec général d’État-major, ministre, député, c’est amusant ! Vous verrez que “mères de famille” fait mieux que “ministre”, “musicien professionnel” ou “président de la République” ! Certes, vous vous en doutiez, mais regardez les notes !
Ce qui est beaucoup moins amusant, c’est que les métiers qui reçoivent la meilleure note croulent sous les contraintes et le mépris public, tandis que les métiers qui reçoivent la plus faible note bénéficient du plus de considération et desoutiende l’Etat… Cela n’en dit-il pas long ? Vous avez là un langage jusqu’ici subliminal, et maintenant révélé, grâce à l’objectivation, et qui vous dit : « Gens de bien, nous vous écraserons, nous les gens les plus nocifs et les moins utiles ! »
A quelque temps de là, je reprenais ces tableaux et modifiais les notes. Je changeai aussi un critère. Le critère “Niveau culturel et intellectuel” ne me paraissait plus aussi important, et je le changeai pour “Capacité à créer de la richesse”, qui me semblait primer (car sans richesse créée, il n’y a pas de société).
Selon ces nouveaux critères, “Journaliste” passait de 1,80 à 0,94 :
JOURNALISTE (grosse presse) | Coeff | Note sur 20 | Total |
Niveau moral | 3 | 0 | 0 |
Pénibilité | 1 | 1 | 1 |
Fiabilité du service rendu | 4 | 1 | 4 |
Utilité du métier par rapport au besoin | 4 | 1 | 4 |
Affermit le pacte social | 2 | 2 | 4 |
Crée de la prospérité, richesse | 3 | 1 | 3 |
17 | Note générale : | 0,94 |
Ainsi, vous le voyez, même si vous modifiez les notes particulières et même un critère, la note générale ne change que peu. Voilà qui répond à l’objection : « Oui, mais ça dépend de la note que tu mets ! » Ainsi, l’objectivation vous livre une fourchette fiable. Le journaliste de la grosse presse reçoit bel et bien, de manière confirmée et objective, l’une des plus basses notes de toute la société.
Voyons “général d’Etat-major” :
GENERAL D’ETAT-MAJOR | Coeff | Note sur 20 | Total |
Niveau moral | 3 | 11 | 33 |
Pénibilité | 1 | 0 | 0 |
Fiabilité du service rendu | 4 | 10 | 40 |
Utilité du métier p.r. au besoin | 4 | 13 | 52 |
Affermit le pacte social | 2 | 3 | 6 |
Crée de la prospérité, richesse | 3 | 0 | 0 |
17 | Note générale : | 7,71 |
Pas brillant. Voyons “mère de famille” :
MERE DE FAMILLE | Coeff | Note sur 20 | Total |
Niveau moral | 3 | 18 | 54 |
Pénibilité | 1 | 18 | 18 |
Fiabilité du service rendu | 4 | 16 | 64 |
Utilité du métier p.r. au besoin | 4 | 20 | 80 |
Affermit le pacte social | 2 | 20 | 40 |
Crée de la prospérité, richesse | 3 | 10 | 30 |
17 | Note générale : | 16,82 |
Vous voyez, Mesdames, à quel point vous êtes utiles à la Nation, et autrement plus que ces gens qui jouissent des honneurs publics et de toutes sortes d’avantages ! Vous saurez ainsi ce que je compte, moi, honorer.
Venons-en à la question suivante : l’ordinateur va-t-il nous déposséder de notre humanité ? Oui, si on lui confie le droit de nous remplacer, si l’être humain ne s’intéresse plus à la pensée originale. Si le texte produit par ChatGPT est plus intéressant qu’un discours de politicien, ce qu’on appelle faussement et de manière très yankee l’Intelligence Artificielle et qui n’est en réalité que de l’informatique, dominera évidemment. L’homme intelligent est attiré par l’intelligence, et si l’intelligence numérique rappelle une certaine intelligence communautaire, il ira là. Hélas, cette intelligence communautaire reproduira tous les poncifs de la pensée correcte, l’Histoire officielle notamment, c’est-à-dire le flot de mensonges convenus. Il est possible cependant que l’homme intelligent s’intéresse à la pensée originale laquelle, étant sans doute moins policée, est peut-être aussi plus inspirante.
Je pense que l’on devrait se servir de l’objectivation numérique pour éliminer la débilité humaine, les opinions toutes faites, les atavismes, les corporatismes qu’on constate par exemple dans le monde judiciaire. Cela amènera un sursaut d’intelligence humaine. Si tel n’est pas le cas, IA ou pas, l’être humain est foutu.
1 Qui a été prononcé effectivement à l’été… 2024 ! (note de l’éditeur)
2 Moneyball, de Benett Miller, 2011.